« I AM A MAN » : exposition et conférences
Sous l’impulsion de son directeur, Gilles Mora, historien et critique de la photographie, photographe lui-même (il a publié, en 2016, un beau recueil de photographies de sud des États-Unis, « Antebellum », éditions Lamaindonne/ University Press of Texas), guitariste de Rock’n Roll (il a tourné avec Carl Perkins), le Pavillon Populaire de Montpellier est devenu un lieu d’exposition mondialement connu consacré à la photographie. Depuis le 17 Octobre 2018 jusqu’au 6 Janvier 2019, « I AM A MAN » offre au public des photographies qui traitent des luttes pour les droits civiques dans le Sud de 1960 à 1970. Le commissaire de cette magnifique exposition est l’émérite Professeur William Reynolds Ferris. Il a sélectionné, avec ses collaborateurs, des clichés du célèbre photographe afro-américain de Memphis Ernest C. Withers (dont une biographie rédigée par Preston Lauterbach sortira début 2019), d’Art Shay, Don Sturkey, Bob Adelman, Spider Martin… De nombreux documents inédits illustrent le thème choisi.
Le comble de notre bonheur est dû à la présence à Montpellier de William Ferris et James Meredith, le premier Afro-américain à entrer à l’Université du Mississippi en 1962. Les deux hommes ont été justement faits citoyens d’honneur de la ville de Montpellier. Au Musée Fabre eut lieu un symposium intitulé « Mémoire du mouvement des droits civiques » avec des universitaires américains et français. Je n’ai malheureusement pu assister qu’aux excellentes conférences de William Ferris et Gilles Mora, ainsi qu’à la performance musicale du jeudi 18 Octobre ; Mary Williams, une étudiante de Bill Ferris, y chanta le gospel magnifiquement (cf vidéo de Victor Bouvéron en fin d’article).
J’eus la chance de rencontrer longuement Bill Ferris. En effet, il avait accepté mon invitation et vint enregistrer une émission pour Radio Clapas, l’une des plus anciennes radios libres, née en 1978. Il s’y exprima en français pour parler de l’exposition « I AM A MAN » et de Blues avec le coffret « VOICES OF MISSISSIPPI » chroniqué dans le n°61 d’ABS Magazine. April et Lance Ledbetter, les créateurs du label Dust-to-Digital qui a publié le splendide coffret, accompagnaient Bill Ferris dans nos studios. Avec beaucoup de patience, d’humilité, de gentillesse, Bill Ferris nous a conté ses rencontres avec James “Son” Thomas, B.B. King, Fred McDowell, Otha Turner (dont les petits-enfants ont obtenu des bourses pour aller à l’Université grâce à son appui), et bien d’autres artistes de ce Sud profond que nous aimons tant. Les anecdotes fusaient. Il nous révéla l’aide qu’il apporta aux petits enfants d’Otha Turner afin de leur obtenir des bourses universitaires, ce qui leur permis de devenir qui médecin, qui avocat. Il nous parla de l’improbable rencontre entre James “Son” Thomas et le poète de la Beat Generation Allen Ginsberg, de l’indéfectible amitié qui le lia à B.B. King (« un homme adorable »). Comment Bill Ferris pourrait-t-il oublier la nuit passée en août 1967 chez Fred McDowell et le café, les petits pains chauds et le bacon du petit-déjeuner ? Bill Ferris les déclamait de sa voix traînante au fort accent du Sud. Tia Gouttebel et Marco Glomeau ont embelli l’émission grâce à une illustration musicale de très haut niveau. Cette formidable matinée se déroula au grand dam du protocole qui s’étonna de la venue de William Ferris sur une “modeste” radio, l’autre rencontre avec les médias étant ARTE qu’il rejoignit après le repas que nous prîmes en commun avec les invités de Radio Clapas.
Ce mercredi 17 Octobre 2018 restera gravé à jamais dans ma mémoire. « Blues From The Delta » que me signa Bill Ferris, fut un des premiers livres sur le Blues que je lus en 1978. Il changea ma vie. La rencontre avec Bill Ferris, responsable de ma passion pour le blues, fut un évènement mémorable.
Par Gilbert Guyonnet
Lien pour écouter l’émission : www.radioclapas.fr,
cliquer sur émission, choisir ‘Just A Little Blues’ du 22/10/2018