De Jewtown à Frank Scott
• Des noms évocateurs de sites, patelins perdus, quartiers ou rues, l’histoire du Blues en est parsemée. Beale Street à Memphis, Deep Morgan à St. Louis, Deep Ellum à Dallas, Hastings Street à Detroit et, n’échappant pas à la règle, Maxwell Street à Chicago. Autant de lieux mythiques mille fois racontés dans livres et magazines. Si certains de ces lieux sont devenus des passages obligés pour touristes en tout genre (Beale Street à Memphis en est l’exemple le plus frappant), d’autres ont disparu dans les méandres du capitalisme. C’est le cas de Maxwell Street et de son marché.
En juin 2004, nous nous retrouvons avec Jean-Luc Vabres, Marcel Bénédit et quelques autres sur un espace de parking vide et quasi-désertique près de Maxwell Street. Rien de ce quartier n’est reconnaissable. Tout a été démoli, rasé, policé, remplacé par des cours de tennis pour étudiants ou autres parkings bien proprement encerclés par un treillis blinquant. La longue histoire de ce quartier et de ses habitants s’en retrouve niée, ramenée à de l’insignifiant fade, à de l’inexistant. Le bitume n’est plus le même, il est propre, asceptisé. Rien, pas une trace ne reste de ce marché mythique, de ces gens, les « non nantis » de la ville des vents… Étrange sentiment, alors que, quelques années auparavant, même si la lutte semblait déjà probablement vaine et perdue, la vie était toujours là, certes incomparable avec ce qu’elle fut, mais bien présente. Me reviennent alors à l’esprit les paroles entendues en 2000 dans cette ville de la bouche d’un célèbre professeur de la non moins célèbre University of Chicago (professeur dont je tairai le nom ici) à qui je faisais part de mon étonnement de la situation et de l’absence de perspective pour ce quartier, pourtant magnifique exemple d’intégration ethnique : « Si la culture n’est pas capable de générer elle-même les fonds nécessaires à sa survie et à sa préservation, c’est qu’elle n’en vaut pas la peine ! Non ? Il me semble que c’est comme cela que vont les choses. » Triste constat ! Certes, Chicago n’a pas le monopole dans ce genre de conneries.
L’histoire du marché de Maxwell Street et du quartier environnant ne date pas d’hier et, dès le début, sera juchée d’épisodes tristes, de démolitions, de transformations, de reconstructions, d’espoirs, de luttes… Loin de moi la prétention de vous refaire l’histoire détaillée et exhaustive de ce quartier – d’autres s’y sont déjà attelés avec beaucoup de succès 1 – mais son importance et son charme passés ne pourront s’apprécier qu’en les replacant un tant soit peu dans leur cadre historique.
En 1847 déjà…
Le nom de Maxwell Street semble apparaître pour la première fois sur la carte de Chicago en 1847 et est dû au Dr Phillips Maxwell. À l’époque, Maxwell Street n’était qu’une route faite de planches de bois qui allait de la partie sud de la rivière Chicago vers l’ouest. Chicago n’est, aux alentours de 1840, qu’une ville de quelques milliers d’habitants. C’est avec le développement du chemin fer que la ville, mais surtout ce quartier, se développe. En 1900, Chicago compte déjà près de 1,75 millions d’habitants et est devenue le centre ferroviaire le plus important des USA (avec plusieurs centaines de trains entrant quotidiennement dans la ville) engendrant dans son sillage la création de multitudes d’usines et entreprises plus ou moins importantes qui se localisèrent autour de ces mêmes voies. On imagine bien la suite : les usines nécessitent de la main d’œuvre, la main d’œuvre doit se loger et manger… C’est ainsi qu’un quartier naît et grandit.
À deux encablures du centre, du « Loop », le quartier aux alentours de Maxwell Street fait partie de ce qu’on appelle de Near West Side. Dès sa création, ce sera un lieu d’intégration de nouveaux immigrants arrivant dans cette grande métropole du Nord. Les nouveaux venus trouvaient dans cette partie de la ville des logements bon marché, de quoi se nourrir et se vêtir, des amis, et retrouvaient souvent des membres de leur famille. Maxwell Street, connu également plus tard sous le nom de Jewtown – la ville juive – était au début essentiellement habité par des immigrants venus d’Europe, plus particulièrement d’Allemagne, d’Italie et d’Irlande, de même que par un grand nombre de gitans. À la fin du XIXe siècle, une nouvelle population essentiellement d’origine et de confession juive d’Europe de l’Est (Pologne et Russie) vint s’y installer pour la simple et bonne raison que c’était là qu’était situé le plus grand nombre de synagogues, mais aussi parce que c’était le quartier le plus proche de la gare où ils avaient débarqué. Des réseaux d’entraide se créaient et permettaient ainsi aux nouveaux venus de trouver repère et accueil. Jusqu’à la fin de la deuxième guerre, la population fut essentiellement juive et le quartier fut aussi le premier ghetto déclaré comme tel à Chicago. Le marché, quant à lui, se serait établi dès 1870 à partir de Jefferson Street et se serait agrandi au fil des années et surtout de l’immigration, pour s’étendre au-delà de douze pâtés de maisons, avec son centre d’activité concentré finalement dans Maxwell et Halsted St. Ce marché ne portera officiellement le nom de Maxwell Street Market qu’à la sortie d’une ordonnance de la ville de Chicago en 1912. Des stands permanents avaient vu très tôt le jour, de même que d’innombrables boutiques installées aux rez-de-chaussée des immeubles avoisinants. Les immigrants fraîchement arrivés y retrouvaient ce qui leur manquait tant de leur pays d’origine : nourriture, contacts humains, traditions… On y trouvait de tout, on négociait…
La fin de la première guerre mondiale fut visiblement un tournant dans l’éclosion de cette partie de la ville. C’est en effet à cette époque que les populations africaines-américaines commencèrent à arriver en masse du Sud et, comme les autres avant elles, elles s’arrêtèrent d’abord à Maxwell Street. De 955 habitants « non-blancs » répertoriés (pour une population globale de 105000 habitants) en 1860, elle atteindra le nombre de 233903 en 1930 pour une population totale de quelques 3 millions d’habitants. 2 La partie de la population juive plus aisée, petit businessmen et autres, quitta peu à peu le quartier pour des parties plus confortables de la ville et fut ainsi remplacée par un nombre croissant de nouveaux arrivants d’origine mexicaine ou africaine-américaine. Dans une ville marquée par une séparation ethnique et sociale criante et un racisme indéniable, Maxwell Street faisait, à ce titre et ce jusqu’à sa disparition, figure de laboratoire social et humain étonnant. Le dénominateur commun – avant d’être l’origine ethnique ou la couleur de peau – était surtout les modestes conditions économiques des nouveaux arrivants.
Dans leurs bagages, le blues du Delta
Avec l’arrivée de la population d’origine africaine-américaine, les traditions subirent des changements, lents mais inévitables. La disparité géographique de l’origine des nouveaux venus africains-américains est intéressante puisqu’elle nous informe dans une certaine mesure quant aux traditions musicales qui ont dû inévitablement être importées. En 1900 par exemple, sur les 29743 personne répertoriées comme « non-blanches », près de 5600 proviennent directement des états du Mississippi, de l’Alabama et du Tennessee, plus de 3000 des états de Géorgie, Virginie et Caroline du Nord, 4411 du Kentucky, le reste des états se partageant la mise restante mais sans jamais représenter une concentration suffisante pour qu’on puisse raisonnablement imaginer que le style musical régional sous-jacent ait pu influencer de manière marquante la culture du quartier. De leur Sud profond, les nouveaux arrivants, métayers et autres anciens ramasseurs de coton, amenèrent plus que probablement leur musique et leurs traditions rurales. De nombreux témoignages indiquent que c’est à cette époque que les musiciens de blues, des songsters, mais aussi des Medecine et Minstrel Shows en tout genre, commencèrent à apparaître aux divers coins de rues dans l’espoir de recevoir une petite pièce. C’est probablement vers cette époque que le natif de La Nouvelle-Orléans – Papa Charlie Jackson (1880-1938) – arriva à Chicago du Texas avec son fameux banjo à 6 cordes accordé comme une guitare. Il enregistra plus tard avec succès pas mal de faces pour Paramount dans les années 20 dont son Maxwell Street Blues en 1925 sous l’étiquette Paramount 12320, premier blues enregistré faisant référence au marché.
Si Papa Jackson avait un style finalement assez sophistiqué pour l’époque, plus proche du ragtime sous certains aspects, il y a fort à parier que dans les décennies qui suivirent – à savoir les années 1930’s et 1940’s – la majorité des nouveaux arrivants était enracinée dans une musique plus rurale. Ils durent en conséquence adapter leur country blues, souvent celui du Delta, aux nouveaux sons, à cette ville plus rapide et oppressante, plus électrique, à cette nouvelle vie plus lourde et tendue. Le musique se transformait ainsi vers ce qui deviendra ce nouveau son urbain de Chicago. Dire que la spécificité du Chicago blues d’après-guerre est entièrement due à Maxwell Street serait une exagération, mais son importance ne peut être sous-estimée. Mike Rowe, dans son ouvrage désormais historique sur le blues de la ville des vents, « Chicago Breakdown » 3 mentionne avec détails combien le marché de Maxwell Street fut moteur dans le développement du blues dit « moderne » de la ville. Les musiciens s’y retrouvaient au milieu de la foule nombreuse pour jouer devant les boutiques et stands. C’est là que Little Walter aurait pour la première fois joué de l’harmonica, que Snooky Pryor jouait avec Floyd et Moody Jones, que Johnny Young commença sa carrière à Chicago avec sa mandoline accompagné par son cousin, le guitariste Johnny Williams (le révérend Williams devrait-on dire, qui malheureusement arrêta le blues pour se consacrer à la religion en 1959).
Si le blues était omniprésent, il n’avait pas l’exclusivité. Johnny Awtson, plus connu sous le nom de “Daddy Stovepipe”, jouait des morceaux comme The Tennessee Waltz, alors que Little Walter lui-même semble avoir commencé avec des polkas et autres valses. La vie musicale y était visiblement d’une richesse et d’une intensité extrêmes. Il n’en fallut pas plus à Bernard Isaac Abrams 4, un petit businessman né à Maxwell Street en 1919 et patron de la Maxwell Radio, Records Company (un des quelques rares magasins de disques du marché), pour se laisser convaincre en 1945 de lancer le label Ora-Nelle à partir d’un petit local (et surtout de très peu de matériel) à l’arrière du numéro 831-833 de Maxwell Street, dans un coin habituellement réservé à la réparation de radios et autre matériel électronique. Bernard Isaac Abrahams publia deux disques. L’étiquette Ora-Nelle 711B présente Little Walter (affublé d’une « Jr ») en compagnie du guitariste originaire du Mississippi Othum Brown (et certaine sources mentionnent la possible présence de Jimmy Rogers) dont on ne sait finalement que très peu de chose. Les morceaux furent enregistrés en 1947. La face A, I keep Lovin You (assez proche du Keep What You Got de Floyd Jones enregistré en 1947 pour Marvel) est chantée par Little Walter, tandis que la face B nous fait découvrir le chant de Brown sur un superbe Ora-Nelle Blues, morceau dans la même lignée que le That’s Allright de Jimmy Rogers, qui lui aussi enregistrera deux titres en 1948 pour Ora-Nelle en compagnie de Little Walter, faces restées à l’époque inédites. L’autre disque publié par Ora-Nelle présente le mandoliniste Johnny Young avec son cousin guitariste Johnny Williams, chantant chacun sur une face. Ici aussi, nous avons droit avec Money Making Woman, chanté par Young, à une pièce majeure de l’histoire du blues moderne de Chicago. Ce furent là les seules productions publiées à l’origine par ce label qui abandonna assez vite pour cause de manque de rentabilité. Abrams avait coutume de dire qu’avec les bluesmen c’était difficile, car ils ne jouaient pas deux fois de la même manière. C’était un Chicago blues encore très down home d’une intensité inouïe. D’autres faces furent enregistées à l’époque mais ne virent le jour que quelques décennies plus tard : on citera Sleepy John Estes avec Hammie Nixon, Jimmy Rogers, Johnny Temple, Boll Weavil Blues Trio. 5 Cela dit, Ora-Nelle n’était pas la seule petit entreprise sur le coup. En 1948, Snooky Pryor et Moody Jones enregistrèrent le désormais légendaire Telephone Blues qui sera publié sur le label Planet. Ces différents titres sont probablement bien représentatifs de ce qui se jouait à l’époque sur Maxwell Street.
De manière générale, on ne compte plus les futurs grands noms qui jouèrent pour quelques pièces sur Maxwell Street dans cette époque charnière pour l’évolution du blues : Floyd Jones, Snooky Pryor, John Henry Barbee, Little Willie Foster, Eddie Taylor, Porkchop Eddie Hines, Homesick James, Moody Jones et Johnny Young,… sont quelques noms souvent cités. Car, même si dès les années 1940’s la ville regorgeait de clubs, la compétition était dure et ces nouveaux venus avaient probablement pas mal de difficultés à trouver des engagements car leur blues était beaucoup plus down home que ce qu’était le blues policé de Chicago à l’époque, toujours marquée par le son de Lester Monrose (Bluebird). Ils se retrouvaient donc sur Maxwell Street pour arrondir leurs fins de semaines. Certains témoignages soulignent qu’il était tout à fait possible de se faire plus en une journée sur le marché qu’en une semaine de clubs. Il suffisait de trouver une boutique prête à de tirer une ligne électrique en échange de deux pièces, et c’était parti dès les premières heures de la journée.
Cette richesse musicale resta de mise pendant encore quelques décennies au cours desquelles nombre de musiciens non professionnels inconnus côtoyaient des figures plus marquantes dont les noms resteront désormais à jamais liés à ce marché. Parmi ces derniers, on citera volontiers – sans aucune exhaustivité – l’harmoniciste à un bras “One Arm” Big John Wrencher, le délicieux guitariste John Lee Granderson, le primitif, obsédant et chaleureux Maxwell Street Jimmie Davis (qu’on verra en Belgique en 1991), l’extrêmement talentueux guitariste James Brewer et, plus que d’autres peut-être, le guitariste aveugle Blind Arvella Gray. Arvella Gray, dont le vrai nom était James Dixon, était originaire du Texas où il naquit en 1906. Aveugle dès les années 1930’s probablement suite à une attaque de banque à Peoria (selon ses propres dires), il arriva à Chicago dans les années 1940’s avec comme bagage des airs entendus dans les des champs de cotons, des chain gangs et proposait un répertoire mêlant des standards du folk, du gospel et du blues comme John Henry. Il s’accompagnait à la guitare dobro avec, comme particularité, qu’il ne jouait que de trois doigts (n’en ayant pas plus d’utilisable à la main gauche !). Présents sur les anthologies dédiées à Maxwell Street dont le sublissime coffret « And This is Free », on le découvre avec plaisir dans les années 1960’s et 1970’s dans le film de Mike Shea du même nom, ainsi que dans le documentaire « Maxwell Street Blues » disponible jusqu’il y a quelques années en VHS. Sa musique est à la fois simple et riche ; une sorte de lien direct avec les premières heures des musiques afro-américaines. Un album sous son nom intitulé « The Swinging Drifter » parut en 1972 sur le label Birch et devint assez vite une pièce de collection se négociant à bon prix. Heureusement, ce document, assez unique en son genre, va bientôt être réédité (sortie le 5 aôut) sur le label Conjuro, et ce avec trois morceaux inédits, quelques photos jamais publiées auparavant et un repackaging luxueux, tout cela grâce à Cary Baker qui fut assez actif à Chicago fin des années 1960’s et début 1970’s. 6
Dans la longue liste des musiciens ayant participé à la vie bouillonnante du marché, on ne peut passer sous silence les noms de musiciens plus proches de nous chronologiquement comme Johnny Dollar, John Embry, Eddie Burks, Bobby Too Tough, Jumpin Willie Cobbs, L.V. Banks, Smilin’ Bobby, Iceman Robinson, Little Scotty, Willie James, la désormais légende vivante Johnnie Mae Dunson (Smith) et Jimmie Lee Robinson qui était là depuis les années 1940’s et qui, jusqu’à la fin du marché, restera un des plus ardents défenseurs de cette tradition, allant jusqu’à entammer un grève de faim de plus de 80 jours pour sauver le marché. Discret et pourtant constamment présent sur la scène de Chicago depuis les années 1940’s, Robinson était un guitariste-bassiste chanteur sobre, efficace, et nombre de ses enregistrements récents ont un lien des plus directs avec Maxwell Street qu’il voyait comme le dernier endroit où le blues « du peuple » se vivait et se jouait vraiment. Bref, du blues traditionnel de Jim Brewer au son électrifié de Hound Dog Taylor, tout y est passé, et nombreux sont ceux qui firent les beaux jours du marché. Et cela continua jusque dans les années 1980’s, même si le déclin du marché se faisait peu à peu sentir depuis les années 1960’s, 1963 plus exactement, quand l’University of Illinois at Chicago – la UIC – commença le subtil mais terriblement efficace programme d’extension de son campus. Certains musiciens n’enregistrèrent jamais malgré un talent indiscutable et probablement aussi un caractère et une personnalité assez peu malléables. Les seuls témoignages en notre possession sont soit oraux, de témoins directs comme Jimmie Lee Robinson 7, soit les quelques rares documentaires enregistrés dans les années 1960’s et 1970’s, alors que le public blanc commençait à témoigner de son enthousiasme pour le Blues. C’est le cas de l’étonnant guitariste-chanteur Pat Rushing, musicien superbe à la hargne et à l’énergie impressionnantes, dont les seules traces enregistrées – à ma connaissance – sont celles laissées dans le documentaire « Maxwell Street Blues » ironiquement et paradoxalement tourné par une équipe de… l’UIC. Voir Pat Rushing se démener est une expérience qui devait valoir le détour. Récemment, l’harmoniciste producteur Scott Dirks mentionnait combien Pat Rushin était imprévisible : « Fin des années 1980’s, je travaillais la nuit dans une station de radio et je passais souvent sur Maxwell Street le dimanche matin avant de rentrer chez moi. Pat Rushing était souvent là très tôt, dès 7h30-8h00. Il installait son matos et commençait à jouer. J’ai souvent joué avec lui, il était incroyablement talentueux, mais en même temps c’était – et c’est toujours j’imagine – un personnage très haut en couleur, comme beaucoup de types de Maxwell Street je dois dire ! Bien que nous ayons souvent joué ensemble, je ne pense même pas qu’il connaissait mon nom. Il m’appelait seulement “Hey, harp-man, vient jouer !” Il jouait aussi de l’harmonica en fait et me demandait toujours mon instrument. Je ne sais pas ce qu’il est devenu ». Aux dernièrex nouvelles, Pat Rushing, aussi connu sous le nom Jewtown Pat ou Little Pat, jouerait essentiellement dans des églises. 8
La mort annoncée…
Les signes précurseurs de menaces sur la survie de Maxwell Street commencèrent en fait très tôt à apparaître, comme le remarque Ira Berkow dans son excellent livre « Maxwell Street : Survival in Bazaar », paru en 1977. Dès le début du XXe siècle, la vie du quartier et du marché sera rythmée par les transformations que la ville subit. Les travaux des chemins de fer en 1926 réduiront quelque peu l’espace. Un premier gros coup sera donné vers 1957 avec la construction de la route express, la Dan Ryan Expressway, qui coupera la rue en deux et poussera un peu plus le marché vers l’Ouest de Union Street. Le coup de grâce aura lieu quant à lui à partir du milieu des années 1960’s avec le programme d’expansion du campus de la University of Illinois at Chicago qui mangera doucement mais inexorablement une grande partie du quartier. Des projets de logements sociaux grignoteront quant à eux la partie ouest. Dans les années 1970’s il ne reste en fait quelques pâtés de maisons, quelques blocks ; le centre étant toujours localisé au croisement de Maxwell Street et de Halsted. Bien que déjà réduite, la vie du marché perdurait, même si les propriétaires de boutiques n’étaient désormais plus exclusivement d’origine juive. 9 Le marché était toujours un endroit unique. Certes, il n’avait plus cette grandeur du début du siècle où près plus de 70000 visiteurs se retrouvaient là chaque dimanche, mais il restait – comme le mentionne souvent Steve Balkin avec insistance – un endroit unique pour cette population assez paupérisée et de laissés-pour-compte de la société américaine, qui essayaient de se faire quelques dollars. Il est vrai que la réputation du marché s’était quand même un peu détériorée au cours des décennies, de plus en plus pauvre et, selon la plupart des témoins, également de plus en plus sale, mais néanmoins l’ambiance y était toujours aussi chaleureuse. D’aucuns 10 disaient qu’à l’époque, avec, on peut l’imaginer, un peu d’exagération, si on vous volait quelque chose dans le centre pendant la semaine, il suffisait d’aller le dimanche sur Maxwell Sreet pour le retrouver et le racheter.
Profitant de cette image pas toujours reluisante du quartier et surtout bénéficiant du support non dissimulé de l’administration de la municipalité qui y voyait une belle opportunité de « nettoyer » quelque peu cette partie de la ville des pauvres et autres immigrants, l’université continua son extension. Dès les années 1980’s, il apparut évident que l’UIC et la ville désiraient simplement rayer de la carte ce quartier de la ville et faire disparaître tous ces vendeurs itinérants ne disposant naturellement pas de permis, de licence, vendant de tout et de rien, salissant l’image bien nette que les politiciens et membres de la direction de l’UIC valorisaient tant. Il est vrai qu’en étant si proche du centre et du Loop, le quartier aiguisait également l’appétit des promoteurs immobiliers et autres businessmen. Il ne restait donc plus qu’à s’arranger ; expropriation sur expropriation, le quartier deviendrait un magnifique exemple de gentrification… Le reste est désormais connu.
En 1994, la ville décide d’officiellement de fermer le marché et d’ouvrir, quelques pâtés plus aux nord sur Canal Street et Roosevelt Road South, le « nouveau Maxwell Street », beaucoup plus petit, en étant certaine de pourvoir exclure les itinérants et vendeurs d’un jour, ceux qui vendaient de tout et de rien pour améliorer un tant soit peu leur quotidien. Avec ces marchands, partirent aussi les vibrations et une partie de la musique. Certains, comme le pianiste James “Piano C. Red” Wheeler, lui aussi un vétéran de Maxwell Street avec son Flat Foot Boggie Band, tentent certes d’entretenir la tradition en jouant presque chaque dimanche sur le marché, mais visiblement quelque chose a changé.
Les années de lutte
Les habitants ne se sont pas pour autant résignés et sont restés jusqu’au bout attachés à leur quartier et à sa spécificité. Après la première vague de démolition importante, commença un mouvement de résistance. Trop tard, selon certains. Quelques acharnés formèrent la Maxwell Street Historic Preservation Coalition et se mirent en tête de lancer une campagne de sensibilisation régionale, nationale, voire même internationale, au travers de la presse nationale et locale et surtout grâce à cet outil désormais puissant qu’est Internet. À partir de leur site web 11, ils entrèrent en contact avec des gens des quatre coins du monde, tentèrent au travers des revues de blues de dénoncer au monde ce phénomène de gentrification. Rien n’y fera. Concerts de soutien, marches et démonstration, envois de courrier au maire, tentative d’amener l’affaire devant la justice, tentatives (vaines) de classification du quartier auprès des instances de préservations nationale des monuments et sites historiques, grève de la faim de Jimmie Lee Robinson, sensibilisations du public via expositions, conférences, articles dans la presse, tout fut fait pour tenter de mettre en évidence aux yeux de tous la richesse humaine et culturelle que l’on était en train de détruire. La coalition tentait vainement de promouvoir la préservation du site historique de Maxwell Street, souhaitait la restauration des bâtiments – à tout le moins des façades restantes – le long de South Halsted Street et de Maxwell Street, dans l’espoir de préserver un site historique qui servirait à honorer l’histoire ce quartier, l’histoire des juifs de Chicago, l’histoire de ces immigrants venant du Mexique, du Delta du Mississippi et des états du Sud.
• Octobre 2000
C’est à l’occasion d’un séjour à Chicago en octobre 2000 que je rencontre Steve Balkin, de la Maxwell Street Historic Preservation Coalition. Rendez-vous un dimanche matin de cette fin d’octobre vers 8h30 dans le North Side chez une figure de proue de cette résistance. Professeur d’Économie à la Roosevelt University de Chicago, il tente tant bien que mal de faire vivre cette contestation. Sa maison est très modeste, son accueil est chaleureux. « C’est triste à dire, mais il me semble que le monde du blues de Chicago ne nous soutient pas. Ils ont baissé les bras », dit-il à plusieurs reprises. « Mis à part des musiciens comme Jimmie Lee Robinson, Johnnie Mae Dunson, Mr H., Little Scotty, Bobby Davis et d’autres, je me demande où sont tous ces spécialistes du blues de Chicago. David Whiteis est avec nous, le poète Sterling Plumpp aussi, même s’il est professeur à la UIC ; des gens viennent des quatre coins du monde, mais les autres, ceux d’ici ? J’ai essayé d’avoir le soutien des patrons de labels, de journalistes, de spécialistes… Mais les réactions sont peu enthousiastes. C’est plus confortable de se concentrer sur le Blues Fest ou d’aller dans les clubs du North Side. » Il semble amer. « Mais ce n’est pas le même blues, ce n’est pas la même musique, ici c’est la vraie musique, celle qui vient des gens et qui est pour les gens, les petites gens. Ici c’est la musique qui vient du cœur, la musique du peuple. »
Il me propose d’aller non pas sur le nouveau marché, mais bien sur ce qui reste de l’ancien. « C’est peut être la dernière fois que des gens vont jouer là bas », dit-il. Il attend des musiciens comme Lilltle Scotty, Bobby Too Tough, Bobby Davis, Kid Dynamite et autres. Tous ne viendront pas. Nous arrivons assez tôt, le quartier est calme, triste, démoli, en ruine. Les maisons aux fenêtres barricadées par des planches côtoient les détritus et les espaces en friches laissés vides par les démolitions. Quelques badauds se promènent malgré l’heure matinale, le fameux Original Jim’s hot dog stand est ouvert et des clients s’y pressent déjà pour acheter le célèbre hot dog épicé, le Maxwell Street polish mis au point par le regretté Jim Stefanovic. Nous sommes à deux pas d’où on tourna quelques scènes pour le film des Blues Brothers ; l’endroit a disparu, il me montre un parking vide, « c’était là ! », dit-il… À deux pas du marchand de hot dog se trouvait aussi la boutique de cassettes et disques de blues du Reverend John Johnson qui, pendant des années, était propriétaire de ce fameux bus scolaire repeint en bleu, devenu symbole récent du marché de Maxwell Street – le Heritage Blues Bus Music – d’où sortait ce blues craché par quelques haut-parleurs bon marché. Sa boutique est, elle aussi, condamnée.
Il nous accueille avec beaucoup de gentillesse. « Je ne sais pas ce que je ferai quand je devrai partir, c’est ma vie ! Le bus, c’est fini, et maintenant je vais devoir quitter ce magasin, le fermer. Je ne comprends pas les gens de la ville et de l’université ! ». Il fermera peu de temps après et sera même inquiété par la police pour avoir vendu des cassettes et CD de blues sur un terrain vague… Heureusement pour lui, il retrouvera plus tard un autre bus et fait à nouveau, avec moins d’entrain visiblement, le marché du dimanche sur le new Maxwell Street Market. « Ce n’est plus la même chose », dira-t-il en juin 2004 lors de notre très brève rencontre. Le tour du quartier continue avec David Whiteis de Living Blues qui s’est joint à nous ainsi qu’un journaliste du new York Times. Les ruines et les espaces vides et autres terrains vagues rendent la rue triste malgré le soleil automnal. Au milieu, se trouve la maison de Tyner White, personnage difficile à décrire, une espèce d’artiste conceptuel environnementaliste complètement déjanté. L’intérieur de sa maison est à l’image du quartier. « La société capitaliste jette et consomme ; je garde, je récupère, j’utilise et je crée avec tout cela ! », dit-il. Devant chez lui, un ancien bus scolaire en ruine, un container rempli de multitudes de choses…
Entretemps, quelques musiciens sont arrivés plus haut dans la rue. Ils préparent leur matos. Certains sourient, d’autres ont le visage plus grave. « Il n’y a plus rien à faire », me disent certains discrètement à l’oreille ; « il reste tant à sauver », clament d’autres ; « on veut survivre, on est chez nous ici, que l’UIC nous laisse vivre ! ». Le batteur/trompettiste/claviériste/chanteur Bobby Davis arrive et se place derrière son clavier. Ce personnage au caractère pour le moins bizarre enregistra à l’époque sous son nom pour Bandera et pour le label de Carl Jones, Firma/CJ sous le nom de Top Hat et Little Jef. Quelques vendeurs s’installent discrètement tout en sachant qu’ils peuvent être inquiétés si la police passe par là. La musique commence, un blues simple. On jamme, on chante. Bobby Davis chante le blues de Maxwell Street en compagnie de son pote Mr H., cet harmoniciste allemand qui s’est fixé à Chicago depuis les années 1950’s. Un peu plus tard, le fort bon guitariste-chanteur Joe Patterson attaque Rock Me Baby devant quelques personnes qui dansent. Les sourires illuminent les visages malgré l’endroit ; c’est le blues quoi… Même si ce n’est pas là le meilleur blues que j’aie jamais entendu, il y a quelque chose dans l’air. Ces gens là tiennent à ce lieu, c’est évident. Un pasteur vient haranguer la petite masse de personnes présentes entre deux morceaux pour les prochaines élections présidentielles de 2000 : « Je me présenterais bien, car moi je connais le peuple, le vrai », clame t’il.
Sur le côté de Maxwell Street, le guitariste-chanteur et artiste Frank “Little Sonny” Scott Jr. est souriant, comme si de rien n’était. Freddy King, dont il fut très proche au début des années 1950’s, va à fond dans son appareil radio-cassette rafistolé par de l’adhésif. Il sourit et mime un jeu de guitare. Celui que l’on surnomme le « Supreme Mayor of Maxwell Street » est un homme chaleureux. « Et oui, ce n’est plus comme avant ! Je suis venu ici dans les années 1950’s, je jouais sur la rue près de Jefferson. Je suis originaire du Texas, je suis aussi un vétéran de la Navy. Maxwell Street, c’était quelque chose ! J’ai habité ici à Jewtown. Il y avait plein de monde ici le dimanche, on ne pouvait plus avancer. C’était le bon temps ». Déjà en 2000, Frank “Little Sonny” Scott Jr ne joue plus de guitare ; lors des jams sur Maxwell Street, il s’amuse surtout avec son trousseau de clés à produire un son percussif assez idiosyncrasique. « Ça s’appelle les Blues Percussiv House Keys », dit-il non sans fierté. « C’est moi qui ai eu cette idée ! ». Et il s’en retourne vendre ses collages, car le bonhomme a d’autres cordes à son arc. Il sculpte, fait de la peinture et bricole toutes sortes de choses comme en témoignaient les fresques murales et la scène au croisement de Halsted et de Maxwell Street où avaient lieu les jams, malheureusement disparues depuis quelques mois. Frank Scott réalisait aussi à l’époque de forts beaux posters/collages en hommage à Maxwell Street, mélangeant photo, slogans, peintures…
Même s’il ne reste pas grand chose de ce lieu mythique, là apparaît encore avec éclat le sourire de ces passants qui battent du pied au son du blues qui dégouline et rythme les ondulations de ces corps qui dansent au milieu de la chaussée. Le son des clés qui se heurtent, la musique est là, sous les regards de quelques-uns venus ce jour-là rappeler qu’elle vit toujours.
• 2004, un sursaut éphémère… (NDLR) 12
Quatre ans plus tard, c’en est bel et bien fini de l’ancien marché. La rue, les immeubles et façades ont été entièrement détruits et les promoteurs qui y ont reconstruit des immeubles proprets au style asceptisé. Plus d’âme, plus de vie, de couleurs, de crasses, d’odeurs et de sons. Nous sommes là à quelques pâtés de maisons de l’ancien marché, sur ce parking presque vide. La musique a déjà commencé avec quelques fidèles de l’ancien marché, du vrai, dont Dancin’ Perkins, Joe Patterson, Mr H.
Une troupe de théâtre amateur propose une pièce relatant l’histoire du marché : « And this is free : the Maxwell Street Bus Production ». Il n’y a presque personne pour les applaudir, alors que la ville est remplie de milliers de festivaliers qui se bousculent le soir au Buddy Guy’s Legends et au Blue Chicago, convaincus d’y vivre Le Blues. Drôle de monde !
Notes :
1 La fin de l’article reprend une séries d’ouvrages et références qui ont été utilisées pour la rédaction de ce papier.
2 Chiffres tirés de Allan H. Spear, (1967), « Black Chicago : The making of a Negro Ghetto 1890-1920 » – University of Chicago Press, Chicago.
3 Réédité sous le titre « Chicago : The City, The Music », disponible chez Da Capo, un ouvrage indispensable !
4 Mike Rowe mentionne le nom Bernard Isaac Abrahams alors que d’autres sources citent Bernard Isaac Abrams.
5 Ces faces furent éditées sur les LP Barrelhouse LP04, St George LP1001 ; disponibles également sur ce CD P-Vine CD 1888 Chicago Boogie.
6 C’était lui qui éditait le petit fanzine Blue Flame et qui participa à la réédition des enregistrements CJ et Colt sur le label Neon.
7 Son le nom légal et musulman était JL Latif Aliomar ; il fut une source inouïe jusqu’à sa mort tragique en 2002 où il se suicida dans une voiture, ne pouvant plus supporter la souffrance causée par une maladie incurable.
8 Cf. l’interview de Smilin’ Bobbby réalisée par Jean-Luc Vabres et publiée dans Soul Bag n°176, 2004.
9 On peut recommander la lecture de l’ouvrage « Near West Side Storties » de Carolyn Eastwood. Composé de témoiganges de membres de diverses communautés, c’est un livre assez éclairant sur l’évolution des petites affaires et commerces du quartier au travers de la seconde partie du XXe siècle.
10 Cf. Felten, Michael, Blues Access 40, 36-40.
11 (NDLR) Le site web en question, actif au moment où JP Urbain a écrit cet article, est désormais fermé. Un nouveau site internet, celui de la Maxwell Street Foundation, sous-titré « The Lost Culture of Maxwell Street », avec à sa tête Laura Kamedulski, Lori L. Grove, Peter N. Pero, Steve Balkin, Nicholas Jackson, Joe Lendabarker, Janelle Walker, Ira Berkow, Dr Irving Cutler, relate la mémoire du quartier et les quelques événements qui s’y déroulent encore aujourd’hui… Des personnalités comme “Barrelhouse” Bonni McKeown (soutien très actif du Maxwell Street Market et de sa culture) ou l’ancien directeur du Chicago Blues Festival, Barry Dolins, en font partie.
12 (NDLR) La rédaction d’ABS Magazine a jugé opportun d’amputer l’article initial de son court dernier paragraphe dans lequel JP Urbain – nous en avions discuté longuement a posteriori – tentait de se convaincre que quelque chose autour du blues pouvait perdurer dans ce quartier. Il écrivait : « Le nouveau marché, quant à lui, reste un espoir pour certains, car le blues y est retourné. En début de matinée de juin 2005, je retrouve des odeurs à nouveau présentes, les gens y revivent peu à peu, ça crie à gauche et à droite, la vie est à nouveau là, même si c’est de manière plus propre et clairement plus réglementée. Avec le Wallace Fish Corner dans le West Side, ce marché est malgré tout un des seuls endroits de la ville où le blues se joue en public dans la rue pour les gens, avec les gens. Le blues y reste authentique, même les célèbres polish hot dog semblent s’y trouver à nouveau… ». Mais ces espoirs furent malheureusement largement déçus.
Références :
* Les documents photographiques référencés sous cette astérisque proviennent de l’ouvrage de Lori Grove et Laura Kamedulski : « Chicago’s Maxwell Street, Images of America » – Chicago, Arcadia Publishing
• Berkow, Ira (1977), « Maxwell Street : Survival in a Bazaar » – Garden City : Doubleday & Company, 1977
• Eastwood, Carolyn (2002), « Near West Side Stories : Struggles for Community in Chicago’s Maxwell Street Neighborhood » – Chicago : Lake Claremont Press.
• Felten, Michael (1999), « Goin’ Down Slow : Maxwell Street Blues » – Blues Access 40, 36-40
• Glover, Tony, Dirks, Scott and Ward Gaines (2002), « Blues With a Feeling, The Little Walter Story » – New York : Routledge
• Lori and Laura Kamedulski (2004), « Chicago’s Maxwell Street, Images of America » – Chicago : Arcadia Publishing
• Leadbitter, Mike and Neil Slaven (1987), « Blues Records 1943 to 1970, A Selective Discography Vol I : A to K » – London: Records information services.
• Leadbitter, Mike, Fancourt, Leslie and Neil Slaven (1994), « Blues Records 1943 to 1970, A Selective Discography Vol 2 : L to Z » – London: Records information services
• Moon, D. Thomas (1996), « Move Over Maxwell Street » – Blues Revue 21, 32-39
• Rowe, Mike (1973), « Chicago Breakdown » – London : Eddison Press. Réédité sous le titre « Chicago Blues : The City and the Music » – Dacapo Press.
• Sharpe, Steven (1993), « The Maxwell Street Market : No More Fun on the Street » – Living Blues 111, 33-39
• Spear, Allan H. (1967), « Black Chicago : The Making of a Negro Ghetto 1890-1920 » – Chicago: University of Chicago Press.
• Sutherland, Sandy (1973), « Interview with Uncle Johnny Williams » – Blues Unlimited 99, 7-9
• Swain, Thomas M. (1975), « A Day on Maxwell Street » – Living Blues 22, 12-14
• Whiteis, David (1989), « The Blues Reality of the Maxwell Street Sounds » – Original Chicago Blues Annual 1, 7-10
Discographie sélective (et non exhaustive) :
Anthologies
• « The Lost American Bluesman » (Various Artists : Frank Scott, Jimmie Lee Robinson) – Midnight Creeper CD2002-2
• « Chicago Boogie » (Various Artists : faces Ora Nelle, Johnny Young, Little Walter, Othum Brown, …) – Barrelhouse LP BH-004/St George LP 1001/ PVine Lp 6714/P Vine cd 1888
• « Chicago Blues – Live at the Fickle Pickle » (Various Artists : Maxwell Street Jimmy, John Henry Barbee, James Brewer, …) – Flyright LP 549
• « I Blueskvarter 1964, Volume 1, 2 and 3 » (Various Artists : Johnny Young, Arvella Gray, John Lee Granderson, James Brewer, … avec interviews) 2cd-set – Jefferson Records SBACD 12653/4, 12655/6, 12658/9)
• « Blues and Gospel from Bandera, Laredo and Jericao Road labels of Chicago » (Various Artists : Jimmie Lee Robinson, Bobby Davis, …) – Ace Records cdchd808
• « Modern Chicago Blues » (Various Artists : Johnny Young, Maxwell Street Jimmy, …) – Testament cd 5008
• « And This is Maxwell Street – Street Recordings Made For 1964 / Documentary Film ‘And This Is Free’ » (Various Artists : Robert Nighthawk, Johnny Ytoung, Carey Bell, Big John Wrencher, Arvella Gray, James Brewer, …) 3cd-set – Rooster records R2641. Le MUST !!
• « Blues from Maxwell Street » (Var. Artists: Arvella Gray, James Brewer, King David, Daddy Stovepipe), Heritage LP HLP 1004
Quelques artistes…
• L.V. Banks, « Let Me Be Your Teddy Bear » – Wolf records cd 120.887
• L.V. Banks, « Ruby » – Wolf Records cd 120.898
• Jim Brewer – Philo records LP 1003
• Jim Brewer, « Tough Luck » – Earwig LP/cd 4904
• Jumpin’ Willie Cobbs and the Fire Balls, « Cotton Slack Blues » – Cobbs Records
• Johnnie Mae Dunson, « Big Boss Lady » – Lakada lmc 1924
• Maxwell Street Jimmy Davis, « Maxwell Street » – Elektra LP 303
• Maxwell Street Jimmy Davis, « Chicago Blues Session Vol 11 » – Wolf records cd 120.857
• Kid Dynamite, « Explosion » – Old Skool 201
• John Lee Granderson, « Hard Luck John » – Testament cd 5031
• Arvella Gray, « The Singing Drifter » – Birch Lp 60091/Conjuro cd (à paraître en 08/2005)
• Papa Charlie Jackson, « Vol1 1924-1935 » – Document Records DOCD 5087
• Floyd Jones/Eddie Taylor, « Master of Modern Blues » – Testament cd 5001
• Robert Nighthawk, « Live on Maxwell Street » – Rounder cd 619624 (Si vous avez l’occasion, sautez plustôt sur le coffret Rooster « And this is Free » qui reprend l’intégralité de ce cd avec d’autre petites merveilles)
• Snooky Pryor – Paula Records pcd-11
• Iceman Robinson, « I’ve Never Been Loved » – Fedora cd 5026
• Piano C. Red, « Cab Driving Man » – Keyboard records botb01
• Jimmie Lee Robinson, « Lonely Traveler » – Delmark Records DE-665
• Jimmie Lee Robinson, « Guns, Gangs and Drugs » – Amina cd-1001
• Jimmie Lee Robinson, « Maxwell Street Blues » – Amina 1002
• Jimmie Lee Robinson, « All My Life » – Apo cd-2011
• Jimmie Lee Robinson, « Remember Me » – Apo cd-2006
• Jimmie Lee Robinson, « Chicago Jump » – Random Chance cd14
• Big John Wrencher, « Maxwell Street Alley Blues » – Blue Sting cd NS028/PVine cd-1889
• Johnny Young, « And His Friends » – Testament cd 5003
• Johnny Young, « Chicago Blues » – Arhoolie cd325
• Johnny Young, « The Chicago String Band » – Testament cd 5006
Jean-Pierre Urbain
Merci à Steve Balkin, Scott Dirks, Emilie, Lori Grove, Robert Sacré et Joseph Brems
Visitez le site de Maxwell Street Foundation