Songs in A minor
• Il est des disques tellement intemporels que même vingt-trois ans après leur parution, il est plaisant (important ?) d’y revenir. C’est le cas de « Songs in A minor » (Arista Records), premier album d’Alicia Keys paru en 2001 et célébré vingt ans plus tard par l’artiste via une réédition spéciale vinyle de luxe et streaming. Retour sur une pépite…
Souvent, les grands albums qui marquent l’Histoire de la musique ont leur propre histoire. C’est le cas de celui-ci, dont une première version existait dès 1998… C’était au cœur de l’été et son label, Columbia, intéressé par le projet d’Alicia, lui explique alors qu’il serait bon d’améliorer le projet. Alicia avait une formation de pianiste classique, à peine 17 ans, et maîtrisait aussi bien l’écriture musicale que les arrangements. C’est là qu’il faut se replonger dans les mémoires d’Alicia Keys pour comprendre cette période : « Ils voulaient que moi, le garçon manqué de Hell’s Kitchen, devienne la prochaine idole pop adolescente ». Autrement dit, transformer la chenille en papillon. S’ensuivent plusieurs propositions de la maison de disque avec divers producteurs qui ne satisfont pas Alicia Keys. Au final, elle choisira Kerry “Krucial” Brothers, véritable génies des sons qui seraient capables de mélanger la musique classique avec d’autres genres musicaux, ce qui n’a pas vraiment plu à la maison de disque…
Alicia décide donc de claquer la porte de Columbia et arrive chez Arista Records ! Nous sommes en 1999. Les conditions sont très différentes de Columbia. Chez Arista, Alicia est maître de sa production, l’album sort en 2001, envahit la célèbre radio Smoothjazz, ce qui fera tache d’huile très rapidement, tant ce nouveau projet est novateur. « Songs in A minor » se répand peu à peu dans le monde entier. Bayou Blue Radio est la première radio en Europe à le diffuser avec le titre Fallin’ qui passe en boucle, puis ce sera au tour des radios nationales. Tout le monde adore Alicia Keys pour son originalité et la qualité de ses musiques et, comme nombre de grands artistes, les albums se succèderont, certains aussi bons que ce premier album, d’autres bien moins intéressants, car Alicia est toujours meilleure lorsqu’elle navigue entre Soul, Jazz, et R&B. Dès qu’elle ne s’aventure que sur le R&B, elle se perd, mais c’est sans doute nécessaire à la gestation de l’album suivant.
Alicia Keys est le fruit d’un père noir et d’une mère blanche. Elle a été élevée par sa mère. Une vie plutôt complexe au début, découvrant très tôt le piano qui est devenu sa passion et visiblement le reste toujours. C’est probablement le piano qui l’a sauvée de la rue et aussi cette particularité que certains appellent le talent dont elle est inondée. Il suffit de voir avec quelle aisance elle use de cet instrument et entendre cette voix unique dans laquelle il y a un vécu, une profondeur que peu possèdent, sauf peut-être des artistes comme Aretha Franklin, Minie Riperton, ou encore Sarah Vaughan. Car Alicia est de ces personnes qui ont quelque chose à dire. Je me souviens que c’est à la même époque que je relisais la Trilogie New-Yorkaise de Paul Auster, peu à peu je commençais à quitter mon identité européenne, la musique d’Alicia, je la comprenais, tout comme je comprenais Paul Auster, trouvant fade tout ce qui m’entourait… Parallèlement, c’est au début des années 2000 que le jazz a réellement évolué ; auparavant, on avait l’impression que Miles Davis et Joe Zawinul étaient tellement admirés que cela semblait geler la forme créative.
J’avoue que cet album d’Alicia Keys a totalement modifié ma façon d’écouter de la musique et de l’avaliser, car Alicia, probablement sans le savoir, a ouvert des portes en offrant autant de propositions artistiques qualitatives dans cet album, en mélangeant les genres musicaux de façon aussi talentueuse, qu’on ne pouvait qu’admirer le résultat et en tirer des leçons.
Fallin’ (beauté de la poésie contemporaine inscrite dans son époque)
I keep on fallin’
In and out of love
With you
Sometimes I love ya
Sometimes you make me blue
Sometimes I feel good
At times I feel used
Lovin’ you darlin’
Makes me so confused
I keep on fallin’ in and out
Of love with you
I never loved someone
The way that I love you
Oh, oh, I never felt this way
How do you give me so much pleasure
And cause me so much pain? (Yeah, yeah)
Just when I think
I’ve taken more than would a fool
I start fallin’ back in love with you
I keep on fallin’ in and out
Of love with you
I never (uh huh) loved someone (someone)
The way that I (way I) love you (uh, uh)
Oh, baby
I, I, I, I’m fallin’
I, I, I, I’m fallin’
Fall, fall, fall (sing)
Fall
I keep on fallin’ in and out (out)
Of love (love) with you (with you)
I never (never) loved someone (loved)
The way that I (I) love you
I’m fallin’ in and out
Of love (of love) with you (with you)
I never (no) loved someone (no, no)
The way that I (uh) love you
I’m fallin’ in and out
Of love (of love) with you (with you)
I never (no) loved someone (no, no)
The way that I (uh) love you
What ?
Il me semblait important de mettre l’entièreté de ce texte ici, car lire est diffèrent d’écouter. Simplicité, beauté des mots… Tant de raisons pour entrer cet album dans nos « Indispensables »… « Songs in A minor » a bénéficié d’une réédition en 2021 sous l’impulsion d’Alicia Keys (20th Anniversary Edition) qui comprend les 16 titres originaux de l’album plus deux titres bonus inédits : Foolish Heart et Crazy (Mi Corazon), issus des sessions d’enregistrement du disque originel. Il n’est jamais trop tard pour parler d’un album qu’on aime…
Thierry De Clémensat