
Conte « bluesé »
• L’histoire est d’autant plus belle qu’elle est vraie ! Un conte « bluesé » pas trafiqué. Une réalité légendaire à l’heure de la post vérité…
… Un soir de grand concert dordognot et de revue néo-orléanaise autour du saxophoniste Jimmy Carpenter, un jeune périgourdin de quatorze ans découvre John Fohl. Il ne connaît rien de ce musicien hors pair, guitariste du grand Dr John depuis de nombreuses années, comme il ignore tout du Blues.

Un coup de foudre immédiat avec une terra incognita résonnent dès lors comme un but, une obsession, une envie incoercible. Un jour, j’irai « eh la bas » comme l’illustre le vieux morceau de jazz ! On travaille dur au rayon pêche du magasin local Jaumouillet pour acheter guitare, ampli et pour commencer à dérouler son propre blues.
Les premiers concerts suivent rapidement et le rêve du voyage transatlantique prend forme. À vingt-et-un ans, New Orleans apparaît en Technicolor. Dans la Cité du Croissant, le sépia en bordure de carte postale n’est jamais très éloigné d’une réalité qui fait la part belle à l’épopée. Retrouver John Fohl au Snug Harbor sur Frenchmen Street compte parmi ces instants de grâce que la ville, à nulle autre pareille, est capable de générer.

Dès lors, le « gars de Périgueux » est invité dans la maison du musicien. Dans un coin du studio, la vieille guitare Martin côtoie un Grammy Award obtenu avec Dr John. La couche de poussière résiduelle s’envole dans l’atmosphère dès les premiers accords de musique. Sous la véranda du devant de la maison, en « front porch », les morceaux références évoquent les glorieux ancêtres. De la gloire locale Snooks Eaglin à Django Reinhart, la palette est large. Le St James Infirmary Blues y retrouve ces inflexions créoles que le séjour solitaire de quinze jours dans le bayou cajun de Beaux Bridge ne manquera pas d’aiguiser. Un ermite et sa guitare qui regardent l’eau de la rivière couler…

Plus tard, ce sera un Road Trip au fin fond du Mississippi, à la recherche de Kenny Bown, autre grand bluesman rencontré lors d’un tour périgourdin. Les juke joints balisent le chemin, l’éclairent au plus profond. Un feeling en rase-motte où le Ground Zéro de Clarksdale apparaît comme une ligne de mire obsédante. La vieille guitare Harmony achetée là devient l’objet rituel de référence capable de débloquer les pires situations.

Peut-être qu’au décours d’un de ces concerts périgourdins ou d’ailleurs croiserez-vous Loïs Morgan. Si tel est le cas, n’hésitez pas à lui demander des nouvelles du Mississppi Bound. Le disque éponyme, fruit de toutes ces pérégrinations, sort ces jours ci. Un album solo avec sa sauce épicée au relent de Louisiane et de Sud profond. Un son « swampy » à la Tony Joe White… L’homme de vingt-six ans sait indéniablement de quoi il parle…
Par Stéphane Colin